La classe de Tess: Qu'est ce que c'est? La dyspraxie

La dyspraxie est un handicap moteur: l'enfant dyspraxique n'est pas déficient; il est même, selon les études réalisées par les neurologues, plus intelligent que la moyenne.
On surnomme la dyspraxie "Le handicap invisible".

Pourquoi est-on dyspraxique? (explication simplifiée)

Au troisième trimestre de grossesse, les neurones du fœtus migrent pour former les différentes aires du cerveau. Chez un enfant dyspraxique, cette migration s'est mal passée et l'enfant, qui devrait avoir une aire du cerveau "Automatisation des tâches" fonctionnelle, se retrouve avec une aire "Automatisation des tâches" qui ne fonctionne pas, ou qui fonctionne très mal. Ce sont les prématurés et grands prématurés qui sont les plus touchés, suivis des EIP (Enfants Intellectuellement Précoces)
Le cerveau n'a pas eu le temps de s'organiser correctement in utero dans le cas des prématurés, le fonctionnement spécifique du cerveau interfère avec certaines aires cérébrales, en ce qui concerne les EIP.

Concrètement:

Quand vous faites vos lacets, vous pouvez discuter avec quelqu'un. Votre cerveau confie la tâche "Nouer ses lacets" à l'aire chargée de l'automatisation des tâches, ce qui fait que vous avez de la "place " dans votre cerveau pour penser à autre chose, parler, chanter...

Un dyspraxique ne peut pas confier ce genre de tâche à l'aire "Automatisation des tâches" puisqu'elle ne fonctionne pas, ou peu. Il est donc obligé de nouer ses lacets en mode "manuel", en réfléchissant et contrôlant manuellement les différentes étapes "Je fais une boucle, je tourne autour de la boucle avec mon autre lacet, je passe le lacet dans le trou, je fais une deuxième boucle, je tire la boucle, je serre mon nœud." à chaque fois qu'il fait ses lacets.

Et c'est la même chose, jour après jour, pour toutes les tâches qui pour vous et moi sont devenues automatiques:
- Ecrire
- Tracer un trait à la règle
- Manger avec des couverts
- S'habiller, se brosser les dents
- ...
Je ne vous parle même pas des tâches où il faut coordonner deux mouvements normalement automatisés (course + tir en sports collectifs, par exemple) ...

ATTENTION: Selon l'importance du handicap, l'automatisation va finir par se faire, mais elle sera très, très longue...

Ce n'est pas fini: la vision d'un dyspraxique n'est pas la même que la vôtre ou la mienne. Ses yeux peuvent avoir du mal à fixer un point, et les dyspraxiques présentent souvent de gros problèmes de repérage dans l'espace (autant dans ce qui relève du sens de l'orientation que pour ce qui relève du repérage dans une page papier ou informatique).
Difficile de lire un texte en enchaînant les lignes, ou de se repérer dans une construction géométrique ou même une opération posée lorsque votre cerveau s'amuse à jouer à Canal + en crypté avec vos yeux.

Tout cela rend souvent les dyspraxiques très maladroits au quotidien et il faut reconnaître que dans une classe, c'est une épreuve pour les nerfs (En ramassant le crayon tombé de sa table pour la 54 ème fois de la journée, respirer un grand coup, réciter la liste complète des noms d'oiseaux dans sa tête, puis se dire que ce n'est pas sa faute et qu'on n'aimerait pas être à sa place, après tout).

Cela les rend également très émotifs et il faut les comprendre. Ils ont ce handicap que personne ne voit, et les capacités intellectuelles plus que suffisantes pour percevoir leur différence et leur inadaptation au monde et en souffrir.
Cela crée une frustration latente, toujours présente; l'école, en particulier, les renvoie sans cesse à leurs difficultés et à leur différence.
Ce handicap étant peu connu, ils sont souvent diagnostiqués tard et ont grandi sans comprendre leur spécificités, sans un début d'explication jusqu'au jour où...

Bien sûr, il existe différents degrés de dyspraxie et ici, je vous parle d'un cas sévère (mais malheureusement pas extrême).